[n° ou bulletin] est un bulletin de
Titre : |
653-654 - Juillet-août 2015 - Spécial Alain Resnais |
Type de document : |
texte imprimé |
Auteurs : |
Alain Resnais, Personne honorée |
Année de publication : |
2015 |
Importance : |
159 p. |
Note générale : |
Edito
Le soir du 24 mai, les présidents du jury cannois, Joel et Ethan Coen, ont remis à Jacques Audiard la Palme d’or du festival. À chaque fois que de grands cinéastes distinguent l’un de leurs pairs, agrandissant le plus souvent le champ de sa notoriété, il y a là comme un geste de reconnaissance de la part des créateurs qui va bien au-delà des oukases prononcés contre tel ou tel artiste par une certaine tendance de la critique française prisonnière de ses dogmes, de son refus d’élargir son champ de vision, de ses crispations identitaires. En ce sens, Cannes est un festival véritablement international (un seul juré français cette année, Sophie Marceau) qui balaie les batailles intra-muros et a couronné, depuis sept ans, quatre films français : Entre les murs, Amour, La Vie d ’Adèle et Dheepan. Les palmarès tracent ainsi comme une histoire du cinéma contemporain, établie par les metteurs en scène eux-mêmes à la tête de leurs jurys.
Qu’on se souvienne de Joseph Losey remettant la Palme d’or à Francesco Rosi (L’Affaire Mattei), René Clair à Francis Ford Coppola (Conversation secrète), Roberto Rossellini aux frères Taviani (Padre padrone), Alan J. Pakula à Ermanno Olmi (L’Arbre aux sabots), Milos Forman à Emir Kusturica (Papa est en voyages d ’affaires), Wim Wenders à Steven Soderbergh (Sexe, Mensonges et Vidéo), Bernardo Bertolucci à David Lynch (Sailor et Lula), Roman Polanski aux frères Coen (Barton Fink), Louis Malle à Jane Campion (La Leçon de piano) et à Chen Kaige (Adieu ma concubine), Clint Eastwood à Quentin Tarantino (Pulp Fiction), Francis Ford Coppola à Mike Leigh (Secrets et Mensonges), Martin Scorsese à Theo Angelopoulos (L’Éternité et un jour), David Cronenberg aux frères Dardenne (Rosetta), David Lynch à Roman Polanski (Le Pianiste), Wong Kar-wai à Ken Loach (Le vent se lève), Stephen Frears à Cristian Mungiu (4 Mois, 3 semaines, 2 jours), Nanni Moretti à Michael Haneke (Amour), Steven Spielberg à Abdellatif Kechiche (La Vie d ’Adèle) et Jane Campion à Nuri Bilge Ceylan (Winter Sleep).
Nous avions prévu, après la disparition d’Alain Resnais l’an dernier, de lui consacrer ce numéro d’été. Il se retrouve donc dans la même livraison que notre compte rendu d’un festival qui ne fut jamais un lieu propice à l’un des plus grands metteurs en scène de l’histoire du cinéma français. Nuit et Brouillard fut présenté hors de la sélection officielle pour ne pas déplaire, dix ans après la fin de la guerre, à notre voisin allemand. Hiroshima mon amour, par égard pour les Américains, ne connut pas les honneurs de la compétition, pas plus que L’Année dernière à Marienbad (Lion d’or à Venise), son auteur ayant signé le Manifeste des 121, ou que Muriel ou le Temps d ’un retour, qui évoquait la torture en Algérie, ou que La guerre est finie, le gouvernement gaulliste ne souhaitant pas froisser le général Franco. Je t’aime je t’aime allait enfin se retrouver en compétition mais le festival de 1968 fut interrompu à cause des événements que l’on sait ! C’est Stavisky... qui eut cet honneur mais Resnais revint bredouille après un mauvais accueil critique revu, depuis, à la hausse. Mon oncle d ’Amérique valut à son auteur sa seule récompense cannoise, le Grand Prix du jury. Plus tard, alors que Berlin lui remettait des Ours d’argent pour On connaît la chanson et Aimer, boire et chanter et Venise un Lion d’argent pour Cœurs, ni Les Herbes folles ni Vous n’avez encore rien vu ne trouvèrent grâce auprès des jurys cannois. Autodidacte, imprévisible, se renouvelant sans cesse, grave et ludique, l’auteur de Providence, comme Stanley Kubrick (qui, lui, fuyait sagement les festivals tandis que Woody Allen refuse systématiquement la compétition), n’a jamais connu un accueil consensuel – nouvelle preuve de sa singularité – réservé aux autres grands.
On connaît les liens qu’il avait établis avec Bruno Podalydès et il nous plaît (autre coïncidence) de consacrer un ensemble à Comme un avion, ce film imprégné de charme et d’imaginaire, boudé par toutes les sections de la Croisette.
Michel Ciment |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
Education aux médias:Revues:Positif
|
Note de contenu : |
Dossier Alain Resnais
- Perspectives critiques
6 Les labyrinthes d’Alain Resnais, Pierre Samson
13 Portrait du cinéaste en savant, Philippe Fraisse
16 Le souffle de l’air, les grands espaces, le murmure de l’eau, Vincent Amiel
19 Alan, David & Alain : Resnais et l’Angleterre, Eithne O’Neill
Une œuvre en perpétuel mouvement
22 1948-1958 : Resnais documentariste, Michel Cieutat
24 1959-1968 : la valse des lendemains orphiques, Floreal Peleato
22 1948-1958 : Resnais documentariste, Michel Cieutat
24 1959-1968 : la valse des lendemains orphiques, Floreal Peleato
26 Les années 70 : À la charnière, Olivier Curchod
28 Les années 80 : et l’oncle d’Amérique vint vraiment..., Pierre Eisenreich
30 1993-2014 : les films comme souvenirs, Yannick Lemarié
Témoignages
33 Entretien avec Sabine Azéma : Il avait le culot de vouloir s’amuser, Michel Ciment et Yann Tobin
39 Entretien avec Pierre Arditi : “Ce qui nous reste à vivre...”, Philippe Rouyer
42 Cher Alain..., André Dussollier
44 L’épreuve du feu, Sandrine Kiberlain
47 Entretien avec Christophe Jeauffroy : Aider Alain à créer, François Thomas
54 “Vos écrivez des films pour le théâtre, je réalise des pièces pour le cinéma”, Alan Ayckbourn
Les derniers projets
60 Or..., Michel Le Bris
64 Le tsar se fait photographier, Alain Resnais
66 Arrivals & Departures, Jean-Louis Livi
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[n° ou bulletin] est un bulletin de
653-654 - Juillet-août 2015 - Spécial Alain Resnais [texte imprimé] / Alain Resnais, Personne honorée . - 2015 . - 159 p. Edito
Le soir du 24 mai, les présidents du jury cannois, Joel et Ethan Coen, ont remis à Jacques Audiard la Palme d’or du festival. À chaque fois que de grands cinéastes distinguent l’un de leurs pairs, agrandissant le plus souvent le champ de sa notoriété, il y a là comme un geste de reconnaissance de la part des créateurs qui va bien au-delà des oukases prononcés contre tel ou tel artiste par une certaine tendance de la critique française prisonnière de ses dogmes, de son refus d’élargir son champ de vision, de ses crispations identitaires. En ce sens, Cannes est un festival véritablement international (un seul juré français cette année, Sophie Marceau) qui balaie les batailles intra-muros et a couronné, depuis sept ans, quatre films français : Entre les murs, Amour, La Vie d ’Adèle et Dheepan. Les palmarès tracent ainsi comme une histoire du cinéma contemporain, établie par les metteurs en scène eux-mêmes à la tête de leurs jurys.
Qu’on se souvienne de Joseph Losey remettant la Palme d’or à Francesco Rosi (L’Affaire Mattei), René Clair à Francis Ford Coppola (Conversation secrète), Roberto Rossellini aux frères Taviani (Padre padrone), Alan J. Pakula à Ermanno Olmi (L’Arbre aux sabots), Milos Forman à Emir Kusturica (Papa est en voyages d ’affaires), Wim Wenders à Steven Soderbergh (Sexe, Mensonges et Vidéo), Bernardo Bertolucci à David Lynch (Sailor et Lula), Roman Polanski aux frères Coen (Barton Fink), Louis Malle à Jane Campion (La Leçon de piano) et à Chen Kaige (Adieu ma concubine), Clint Eastwood à Quentin Tarantino (Pulp Fiction), Francis Ford Coppola à Mike Leigh (Secrets et Mensonges), Martin Scorsese à Theo Angelopoulos (L’Éternité et un jour), David Cronenberg aux frères Dardenne (Rosetta), David Lynch à Roman Polanski (Le Pianiste), Wong Kar-wai à Ken Loach (Le vent se lève), Stephen Frears à Cristian Mungiu (4 Mois, 3 semaines, 2 jours), Nanni Moretti à Michael Haneke (Amour), Steven Spielberg à Abdellatif Kechiche (La Vie d ’Adèle) et Jane Campion à Nuri Bilge Ceylan (Winter Sleep).
Nous avions prévu, après la disparition d’Alain Resnais l’an dernier, de lui consacrer ce numéro d’été. Il se retrouve donc dans la même livraison que notre compte rendu d’un festival qui ne fut jamais un lieu propice à l’un des plus grands metteurs en scène de l’histoire du cinéma français. Nuit et Brouillard fut présenté hors de la sélection officielle pour ne pas déplaire, dix ans après la fin de la guerre, à notre voisin allemand. Hiroshima mon amour, par égard pour les Américains, ne connut pas les honneurs de la compétition, pas plus que L’Année dernière à Marienbad (Lion d’or à Venise), son auteur ayant signé le Manifeste des 121, ou que Muriel ou le Temps d ’un retour, qui évoquait la torture en Algérie, ou que La guerre est finie, le gouvernement gaulliste ne souhaitant pas froisser le général Franco. Je t’aime je t’aime allait enfin se retrouver en compétition mais le festival de 1968 fut interrompu à cause des événements que l’on sait ! C’est Stavisky... qui eut cet honneur mais Resnais revint bredouille après un mauvais accueil critique revu, depuis, à la hausse. Mon oncle d ’Amérique valut à son auteur sa seule récompense cannoise, le Grand Prix du jury. Plus tard, alors que Berlin lui remettait des Ours d’argent pour On connaît la chanson et Aimer, boire et chanter et Venise un Lion d’argent pour Cœurs, ni Les Herbes folles ni Vous n’avez encore rien vu ne trouvèrent grâce auprès des jurys cannois. Autodidacte, imprévisible, se renouvelant sans cesse, grave et ludique, l’auteur de Providence, comme Stanley Kubrick (qui, lui, fuyait sagement les festivals tandis que Woody Allen refuse systématiquement la compétition), n’a jamais connu un accueil consensuel – nouvelle preuve de sa singularité – réservé aux autres grands.
On connaît les liens qu’il avait établis avec Bruno Podalydès et il nous plaît (autre coïncidence) de consacrer un ensemble à Comme un avion, ce film imprégné de charme et d’imaginaire, boudé par toutes les sections de la Croisette.
Michel Ciment Langues : Français ( fre)
Catégories : |
Education aux médias:Revues:Positif
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Note de contenu : |
Dossier Alain Resnais
- Perspectives critiques
6 Les labyrinthes d’Alain Resnais, Pierre Samson
13 Portrait du cinéaste en savant, Philippe Fraisse
16 Le souffle de l’air, les grands espaces, le murmure de l’eau, Vincent Amiel
19 Alan, David & Alain : Resnais et l’Angleterre, Eithne O’Neill
Une œuvre en perpétuel mouvement
22 1948-1958 : Resnais documentariste, Michel Cieutat
24 1959-1968 : la valse des lendemains orphiques, Floreal Peleato
22 1948-1958 : Resnais documentariste, Michel Cieutat
24 1959-1968 : la valse des lendemains orphiques, Floreal Peleato
26 Les années 70 : À la charnière, Olivier Curchod
28 Les années 80 : et l’oncle d’Amérique vint vraiment..., Pierre Eisenreich
30 1993-2014 : les films comme souvenirs, Yannick Lemarié
Témoignages
33 Entretien avec Sabine Azéma : Il avait le culot de vouloir s’amuser, Michel Ciment et Yann Tobin
39 Entretien avec Pierre Arditi : “Ce qui nous reste à vivre...”, Philippe Rouyer
42 Cher Alain..., André Dussollier
44 L’épreuve du feu, Sandrine Kiberlain
47 Entretien avec Christophe Jeauffroy : Aider Alain à créer, François Thomas
54 “Vos écrivez des films pour le théâtre, je réalise des pièces pour le cinéma”, Alan Ayckbourn
Les derniers projets
60 Or..., Michel Le Bris
64 Le tsar se fait photographier, Alain Resnais
66 Arrivals & Departures, Jean-Louis Livi
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